Maman pétille
15 Novembre 2018
A l’arrivée de bébé, après les questions d’usage « prénom/poids/taille », vient la question fatidique : « et ton accouchement s’est bien passé ? ».
« Oui, j’ai été césarisée ».
Et là, c’est le drame.
En fonction de l’interlocuteur, différents scénarios se profilent.
Réponse A : « Oh mince, pardon »
Réponse B : « Ah bein ça va, ça a été plutôt cool, tu n’as pas été trop fatiguée/stressée »
Réponse C : (Gros blanc et regard dénigrant) « L’essentiel c’est que bébé aille bien »
Réponse D : un glorieux mix des trois réponses précédentes
Selon le Petit Larousse la césarienne est une « opération chirurgicale qui consiste à extraire le fœtus par incision de la paroi abdominale et de l'utérus, quand l'accouchement est impossible par les voies naturelles ».
J’avoue, la définition est loin de faire rêver.
En France, une femme sur cinq accouche par césarienne.
Pourtant aujourd’hui, cela reste encore un sujet tabou.
Un de ceux que l’on n’ose pas aborder avec tout le monde, et encore plus quand vous en gardez un bon souvenir. Est-ce honteux d’affirmer que l’on n’a pas de regret ?
Pourquoi les personnes se sentent obligées de s’excuser quand on annonce que bébé est né par césarienne ? Est-ce que cela s’apparente à une mauvaise nouvelle ?
Pourquoi serait-ce un oxymore d’affirmer que l’on a accouché par césarienne ? Est-ce illégitime ?
Ça a été mon cas, pour mes deux grossesses.
A mille lieux de l’accouchement naturel que j’avais idéalisé.
Oui, j’ai été césarisée.
Pour Cracotte, j’ai eu quelques jours pour m’y préparer. Une césarienne programmée. Pour Paupiette, je pensais y échapper. Et puis tout s’est accéléré.
Il en a été ainsi. Elles m’ont été imposée, comme pour la majorité.
Et je l’ai accepté. Sans regret, ni culpabilité.
Et pourtant ce n’était pas une partie de plaisir.
Croyez-moi j’étais loin de me marrer au bloc, allongée, les bras en croix, attachée. J’étais morte de froid.
Cette piqûre, cette décharge qui t’irradie le corps, sentir la peur, l’angoisse, le stress monter en même temps que les fourmillements qui te gagnent peu à peu. Être paralysée.
Sentir sans ressentir.
Alors pour faire obstacle à ce tourbillon d’émotions contraires, tu essaies de te concentrer, de te focaliser sur ta respiration, d’oublier ces foutus machines qui font bip-bip, ce tensiomètre qui te comprime le doigt à intervalles réguliers, de faire abstraction de l’armée de soldats en blouses bleues, vertes, roses, méconnaissables sous leur masque, que tu salues pour la cinquième fois en l’espace de 10 minutes.
Imaginer ce qui est en train de se passer.
Contrairement à ce que l’on peut croire, du stress, de la peur, oui il y en a, même si on est déjà passé par là une première fois.
Des douleurs et de la fatigue aussi.
J’étais loin de m’imaginer que j’allais avoir mal, aussi mal. Jour et nuit. Que j’allais avoir autant de difficultés à me lever, à uriner, à me mouvoir, à m’occuper de mon enfant, à lui donner son bain, à le nourrir, à l’habiller.
Pour autant, inutile de vous excuser.
Je ne me plains pas.
Je ne cherche pas à attirer les regards apitoyés et encore moins à passer pour la donneuse de leçons.
Chaque accouchement est unique. Chaque histoire est différente.
Je souhaite simplement remettre les choses à leur place. Et tenter d’envoyer valser certains à priori.
Aujourd’hui encore, certaines mamans ont du mal à accepter leur césarienne. Je reste convaincue que les jugements, les sarcasmes ou parfois les simples regards subis y sont pour beaucoup.
J’ai espoir de penser que si l’opinion changeait, cet acte serait mieux accepté.
Nous ne vivons pas au pays des bisounours me siffle t-on … c'est vrai, mais c’est parfois bien dommage…
Mettre un enfant au monde, par voie basse ou par voie haute, par voie naturelle ou par voie chirurgicale, a pour seule et unique finalité de donner la vie.
Une rencontre au sommet avec un petit être qui ne demande qu’à être choyé.
N’est-ce pas simplement ce que l’on devrait retenir ?
Rien que pour ça, je n’ai pas honte de le dire.
« Oui, j’ai accouché par césarienne ».
Un accouchement moins intimiste mais tout aussi magique.
Voilà ce que j’ai décidé d’en retenir.
Crédit photo : Pixabay